Laurent, un ami qui habite a Dali, enregistre des musiques de villages, essentiellement en Asie du Sud Est. J'aime une partie de ce que je connais de ses enregistrements. Il s'agit de musique réellement traditionnelle, et pas de l'acculturé orchestre peinturluré a touriste disponible dans toute médiathèque qui accepte ce genre d'enregistrements au rayon musique du monde.
J'écoute souvent de la musique, mais je ne saurais pas décrire les enregistrements de Laurent. Je me permets de signifier la puissance,  la pureté et l'authenticité ressenties. L'article qui suit est pour moi une contribution a faire la promotion de son label KinkGong, de sa démarche en général.

Je précise que le texte qui suit peut paraître corrosif a certains égards, mais ça n'est pas gratuit comme vous pourrez sans doute le pressentir et le comprendre. Cette publication est en français ce qui permet de relativiser la problématique d'un étranger diffusant un discours sur les minorités,la culture et donc qui aborde la politique au pays du milieu. Ce blog est de toute façon « filtré » par le Great Firewall (sic), le risque de sa diffusion aux chinois francophones est limité, je ne me permettrais peut-être pas de diffuser ce texte si ce n'était pas le cas. Je ne compte pas me faire dégager ou dans une moindre mesure a me faire remarquer, j'ai passé l'age des velléités agitatrices de bocal sans autre suite que la satisfaction d'un ego poilitique en expansion (re-sic).
Bref.
Ce texte apporte la vision d'un passionné sur les minorités ethniques en Chine, leur culture et leur musique. Il permet aussi de faire la diffusion et la promotion de ses productions en France, alors diffusez, merci.

Enjoy ;-)

note : j'ai utilisé des photos du blog de tanding, la femme de laurent, je ne puis légender correctement.



DES MINORITÉS ETHNIQUES EN CHINE

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Ce texte regroupe des informations obtenues par mes nombreux voyages en zones de minorités ethniques en Chine et ailleurs, d'expériences et analyses personnelles et de textes écrits et publiés par trois auteurs pour des universités américaines.

J'ai beaucoup appris du livre de Steven Harrell "Ways of Being ethnic in southwest China", l'auteur est un professeur de l'université de Washington aux États-Unis, spécialiste des Yi Nuosu, un groupe ethnique du sud de la province du Sichuan en Chine.

En 2006, en route pour le lac Lugu au nord de la province du Yunnan, zone limitrophe avec le sud Sichuan, je traversais la ville de Ninglang, fief Nuosu au Yunnan et découvrais simultanément la réalité sur le terrain et les précieuses informations contenues dans le livre de Steven Harrell. En me promenant dans les rues de Ninglang, ou la devanture de la plupart des magasins de la ville a son effigie en deux langues écrites : les caractères chinois ainsi que les caractères très différents en langue et pictogrammes Nuosu, je me rappelais mon premier voyage en Chine en 1992 ou j'avais comme un touriste traversé le Yunnan du nord au sud, passant par Lijiang. Mon compagnon de route de l'époque photographiait ces femmes costumées qui portaient une coiffe particulière faite d'une étoffe carrée de couleur noire, qui nous rappelait la coiffe traditionnelle des Alsaciennes. Parce que nous étions a Lijiang fief des Naxi, nous assumions naïvement que ces femmes étaient Naxi, j'apprenais 14 ans plus tard qu'il s'agit du costume des femmes Nuosu.

La vision des touristes est souvent faite d'informations simplifiées sur les endroits qu'ils visitent, ainsi 4 endroits s imposent au visiteur du Yunnan, depuis Kunming il se rendra surement a Dali, fief Bai, a Lijiang, fief Naxi puis a Zhongdian ( rebaptise Shangri La ) au nord fief tibétain ou encore a l'extrême sud de la province au Xishuan Bana, fief Dai, il aura peu d'opportunités dans sa course aux sensations exotiques rapides de découvrir un paysage ethnique bien plus complexe. Peut-être aura-t -il l'occasion de voir des Yis, répartis un peu partout sur le territoire du Yunnan ou du sud Sichuan et de se poser la question comme moi, de savoir quelle elle est la connexion entre ces différents Yis ? Pourquoi et comment tant de Yis installes dans des endroits si éloignés les uns des autres ? Avec des costumes, des langues, des musiques si différentes, d'où vient cette unité ethnique, ce nom même de Yi ? Ou alors s'agit-il de formuler la question différemment ? Comment 8 millions de personnes se retrouvent sous le même patronyme ethnique Yi, au vu de toutes ces différences ? Pourquoi s'agit-il en fait d'un concept ethnologique invente par les Hans ? Alors que tous ces différents groupes appelés officiellement Yi se nomment dans leur langue respective par des noms jamais employés en dehors de leur communauté ?

Steven Harrell est celui qui put répondre a mes questions, les réponses de mes interlocuteurs chinois (Hans) ne pouvaient me satisfaire, prétendant a des ancestres communs a tous ces groupes, je leur demandais comment ils en étaient arrives a cette conclusion, je doute de l'utilisation d analyses ADN appliquées a ces minorités ethniques, surtout dans les années 50. Venons en aux explications plus sérieuses et non politiquement motivées de Steven Harrell, qui nous fait une analyse magistrale du processus de recensement des années 50.

Jusqu'à 1949 le terme Yi signifiait tout simplement sauvage, l'histoire veut que ce soit Mao Zedong qui ait change la terminologie , de nombreux groupes ethniques de cette partie du sud ouest de la Chine étaient qualifies de sauvages ou communément appelés Luoluo, Mao aurait fait change le terme péjoratif Yi en un homonyme signifiant une casserole qu'on pose sur le feu, la langue chinoise permet ce genre de subtilités, la prononciation est sensiblement la même tandis que le caractère écrit est différent.


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En 1949, les communistes accédant au pouvoir héritent de toute la perception culturelle nationaliste réminiscente de la république teintée de théories marxistes léninistes, il leur fallait unifier un pays que je qualifierais plutôt d'empire, constitué d'une grande diversité ethnique, reconnaitre ou recenser ces différents groupes ethniques afin de les amener vers l'égalité prônée par un état communiste. Jusque la dans l'histoire chinoise, 5 groupes ethniques essentiels faisaient partie du paysage, les Hans bien sur, qui représentent de nos jours plus de 90% de la population, les Mandchous et les Mongols ayant conquis le pouvoir a divers moments de l'histoire chinoise, et les Tibétains et Huis (un concept particulier qui désigne des populations converties a l'Islam). Les autres disséminés un peu partout étaient rarement reconnus et largement ignores de l'ensemble de la population chinoise.

En ce qui concerne le Yunnan, on estime que vers la moitie du 19eme siècle, les importantes migrations Hans changent les données démographiques et ces derniers constituent des cette époque environ 50% de la population de la province. Dans les années 1950, le pouvoir communiste compte s'installer dans les zones reculées du pays et entreprends de recenser ces groupes sous développés afin d'y amener le progrès. Selon les théories marxistes léninistes de développement historique, 5 stades se succèdent du primitif a l'esclave, puis du stade féodal au capitalisme et enfin au socialisme. Dans la Chine des années 50, il était tout a fait normal de considérer que l'essentiel des groupes minoritaires étaient encore au stade primitif, d'esclave ou féodal, tandis que les Hans avec quelques musulmans, Mandchous et Coréens étaient déjà passés au stades supérieurs.
Les communistes demandaient donc a leur frères inférieurs de bien vouloir suivre l'exemple des Hans et de franchir rapidement, grâce au parti, les différentes étapes historiques qui les séparaient, confirmant les Hans dans leur position dominante, ils allaient leur donner l'opportunité ou les forcer ( selon les différents points de vue ) a se joindre au progrès universel.

Le fait de classifier et de mesurer la distance qui sépare chaque groupe ethnique de l'idéal culturel du noyau Han, les deux principes du projet ethnologique des années 50, sont déjà présents dans la littérature des siècles passes sous les dynasties impériales. Dans les années 20, toutes sortes d'influences occidentales sont absorbées par la Chine républicaine et c est l'époque de l'introduction de sujets comme l'ethnologie ( minzu xue) ou l'anthropologie dans quelques universités, a Pékin, Canton et Xiamen. Dans les années 30 et 40, des ethnologues chinois ont conduit des recherches chez certains groupes ethniques, avec des pratiques classificatoires et considérations essentiellement semblables a celles de leur prédécesseurs de l'époque impériale. Les ethnologues chinois de 1950 a 1958 avaient pour tache, malgré leur tendances d'universitaires bourgeois sous influences occidentales, de contribuer au projet d'unité nationale entrepris par le parti, considérée comme réactionnaire a partir de 1957 ou anéantie a partir de 1966, l'ethnologie chinoise redémarre dans les années 80 avec la publication de textes des années 50, avec toujours le même mot d'ordre d'unité nationale et l'ajout du concept désormais dominant de développement économique. Il s'agit alors de reconstruire sur les ruines de la révolution culturelle ( 1966/1976 ) une politique de développement économique dans un État « pluri-ethnique ».

Mais revenons au projet d'identification ethnique des années 50, qui en suivant des règles de l'ethnologie soviétique stalinienne devait déterminer un groupe ethnique selon 4 caractéristiques communes : la langue, le territoire, l'économie et la nature psychologique qui se manifeste dans une culture commune. Le projet d'identification commença lorsque les différents groupes ethniques furent invites a s'inscrire et remplir des formulaires, selon des sources publiées en 1981 par Fei, qui travailla a ce recensement, plus de 400 groupes se manifestèrent et furent analyses par ces équipes de chercheurs, qui appliquaient avec plus ou moins de zèle ces 4 critères staliniens. Les décideurs politiques ont en 1962 établis , a l'aide des données recueillies dans les années 50 que la république populaire de Chine comptait 54 groupes ethniques plus les Hans, les Jinuos du Yunnan furent officiellement rajoutes a la liste en 1979. Et voila, depuis cette époque la Chine compte officiellement 56 groupes ethniques ou minzu (généralement maladroitement traduit par nationalités).

On pourrait essayer de mieux comprendre comment 8 groupes ethniques sont regroupes rigidement sous le même nom de Yi, des groupes ethniques qui conversent dans des langues tibéto-birmanes inintelligibles entre elles, occupant des territoires différents, ayant développé des pratiques culturelles différentes, je ne commenterais même pas la notion de nature psychologique ! Les critères staliniens furent plus aisément appliques en Mongolie intérieure, au Tibet ou au Xinjiang, ou des communautés certes différentes vivaient sur des territoires compacts, plus raisonnablement uniformes culturellement et eurent toutes des expériences historiques d'États indépendants. Mais au Yunnan et globalement au sud ouest de la Chine, un autre effort de compréhension aurait été nécessaire dans une zone ou différentes collectivités culturelles et linguistiques ont cohabité, même si certaines d'entre elles ont aussi eu des expériences d'État indépendant, mais pas dans l'histoire récente. Il y eut même dans les années 50 un débat interne ou l'on questionnait la validité de l'application du terme minzu pour des groupes ethniques au stade primaire de l'évolution et par conséquent l'usage du terme tribu ( buluo ) était il plus adapté ?

Jiang Yong Xing écrit en 1985 sur le recensement dans la province du Guizhou, commentant que les équipes de chercheurs du recensement des années 50 attribuaient trop d'importance a des considérations historiques d'un point de vue Han et ne prirent pas assez en considération les souhaits d'affiliation des groupes ethniques recensés, avec comme résultat de nouveaux conflits sur leur identité ethnique au Guizhou ou des groupes ethniques continuent de contester leur appartenance au concept ethnique de Miao ( que les occidentaux appellent généralement les Hmongs ). Cheung affirme en 1995-96 que de nombreux groupes ethniques de cette région sont encore a identifier. Au Sichuan ou au nord du Yunnan, des groupes ethniques furent officiellement rattaches aux Tibétains, contre leur gré, comme les Pumis ou Baima Zang, ils croient effectivement et suivent des pratiques religieuses de sectes du bouddhisme tibétain, mais disposent de leur propre langue et culture, depuis les 300 dernières années ils ont été soumis/convertis au bouddhisme tibétain et donnent en général un fils au monastère tibétain le plus proche. Il est relate que le 10 ème Panchen Lama qui est mort en 1989 se félicitait d'avoir ainsi étendu l'aura de la communauté tibétaine en incluant quelques milliers de nouveaux membres venus grossir les rangs, d'une communauté déjà durement touchée par l'exode vers l'Inde de la clique du Dalai Lama depuis 1958. Les Mosuos du lac Lugu ont depuis une dizaine d'années le droit de se revendiquer en tant que tels, précédemment ils devaient accepter d'être considérés comme Naxi.

Les premières phases du communisme du début des années 50 semblaient donner une plus grande marge d'autonomie a des groupes non Hans qui avaient combattu lors de la guerre civile a la défaite du Kuomintang, aux côtés des partisans communistes, mais une fois au pouvoir la nature de l'autonomie fut fermement subordonnée au gouvernement central de Pékin. Durant les années 50 et de nouveau depuis les années 80, de nombreux cadres du parti étaient/sont des membres de groupes ethniques minoritaires et l'usage des langues minoritaires fut largement accepté comme moyen d'instruction dans les écoles et pour exprimer la propagande du parti. Durant la période plus radicale de 1957 a 1979 et particulièrement pendant la révolution culturelle, des mesures et pratiques délibérées tendent a tout simplement éliminer toute culture, religion, coutume voire individus des minorités. J'ai rencontré pas mal de gens âgés qui m'ont témoigné de l'assassinat , de l'emprisonnement de membres de leur familles, pour des raisons souvent futiles, des pratiques policières qui n'ont rien a envier a n'importe quel régime fasciste. En 1958 un grand nombre de chefs de villages de petites communautés ethniques en milieu rural furent exécutés, durant la révolution culturelle des jeunes gardes rouges ont terrorisé des gens qui chantaient lors de leur récoltes, une femme Miao que je souhaitais enregistrer m'a confié en pleurant qu'elle n'a pas chanté depuis cette période.


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Toujours selon Steven Harrell, il y a depuis 1991 une politique de facto non admise officiellement qui consiste a ne pas confier la tache de secrétaire du parti d'une préfecture a un membre de minorité ethnique. Pourtant la Chine compte quantité de zones autonomes, mais ou les cadres du parti d'origine non Han se cantonnent a un rôle subalterne et ou les décisions sont toujours prises par Pékin. Le développement économique des régions de minorités est différent en 3 points de celui des autres régions, tout d'abord on y observe un schéma que je qualifie de colonial ou néo-colonial ( argument complètement inacceptable en Chine !). Les régions périphériques de la Chine sont toujours perçues par les décideurs politiques et économiques comme des sources de matières premières et des marches pour les produits industriels de consommation, les minorités ethniques sont installes sur 50 % du territoire chinois et donc sur une proportion énorme des matières premières, minerais et ressources forestières, qu'ils devraient pouvoir contrôler et qui sont exportés au profit des business Hans des grandes villes.

Deuxième point, les zones de minorités sont moins peuplées en comparaison des zones traditionnellement Hans, le pouvoir central y voit donc des régions propices a l'introduction d'un surplus de populations. Depuis les années 50 de vastes programmes d'implantation de populations hans on été organisés, incluant des marchands, cadres, professeurs sans oublier des troupes militaires, policières et personnel de gouvernement. Durant la révolution culturelle de nombreux indésirables des grands centres de population ont été diriges de force vers ces zones reculées. L'implantation de colons Hans s'est intensifiée depuis les années 80 vers les régions du Tibet, du Xinjiang et de la Mongolie intérieure, ou les villes sont essentiellement tenues et développées par ces derniers. Pratiquement nulle part les minorités locales ne sont responsables de leur développement économique.

Ces migrations considérables sont la source essentielle des conflits ethniques qui existent aujourd'hui en Chine. Or personne en Chine ne souhaite s'exprimer sur cet aspect du conflit ou n'est conscient de son rôle de colon, si j'emploie ce terme avec des Hans installés au Tibet ou au Xinjiang, ils refusent toute communication, dans le mental chinois le colon c'est l'occidental qui a durant des siècles bafoué l'identité chinoise, pas eux ! Ne demandez pas a un han pourquoi des enfants tibétains ou ouïghours leur jettent des pierres, il ne sait pas !! J'ai récemment au Xinjiang entendu un chauffeur de taxi me déclarer tout simplement que les Hans sont les plus nombreux et les plus forts !

Troisième point, la Chine étant devenue l'une des plus importantes économies de marché de la planète, un certain nombre de membres de minorités ethniques se sont aussi tournées vers un système économique ou la seule chose a vendre est leur ethnicité même . Le tourisme ethnique s'est développé a grande échelle depuis les années 90 pour recevoir des touristes chinois ( en grande majorité ) et étrangers. Le gouvernement en fait la promotion pour créer des revenus dans des zones en voie de développement. En plus de l'aspect économique, le tourisme ethnique est un facteur de renaissance du sentiment d'appartenance a un groupe ethnique minoritaire, qui fut bafoué depuis la fin des années 50 et est encourage depuis l'ère des reformes économiques.

L'exemple de Dali ou Lijiang au Yunnan, ou les communautés Bai ou Naxi étaient relativement acculturées sous influence han, on constate un regain d'artifices ethniques, des costumes aux pratiques religieuses ( qui étaient interdites durant une vingtaine d'années) pour recréer une atmosphère ethnique propre a attirer le tourisme. Dali ou Lijiang, qui furent totalement reconstruites a partir de la fin des années 90, Lijiang a cause du tremblement de terre de 1997. Un revival architectural ( ce que j'appelle le faux-vieux) a restructuré ces 2 petites villes a l'aide d'éléments ethniques valorisants. Lijiang est devenu un modèle de développement touristique, des entrepreneurs pas toujours membres de groupes ethniques ont réussi a s'enrichir grâce a la fabrication et vente d'artisanat local ou a vendre des spectacles aux tour opérateurs, a faire la promotion de nourritures locales, a concevoir une atmosphère que les touristes perçoivent comme ethnique.

Creusons un peu le sujet de l'industrie du tourisme, en élargissant la vision pas seulement a la Chine mais prenons notaient l'exemple d'Angkhor au Cambodge. Tout d'abord une parenthèse sur le tourisme de masse qui nous amène aux États-Unis. Les américains ont inventé ces personnages de dessin-animé et développé un monde de fiction a l'aide de tous les médias utilisables. Je fais référence a Disneyworld, qui s'impose comme le modèle du parc d'attraction depuis déjà pas mal d'années. Dans d'autres pays comme le Cambodge ou la Chine, qui n'ont pas Mickey Mouse ou Donald Duck comme éléments de leur patrimoine culturel, l'industrie du tourisme récente a souhaité prendre comme thème les minorités ethniques, pour ses parcs d'attractions.

Shenzhen, ville limitrophe d' Hong Kong et fleuron de la zone économique spéciale, symbole de la réussite chinoise, a crée ce parc d'attraction qui rassemble des copies des grands monuments mondiaux ( tour Eiffel de 100 mètres, etc.) mais aussi des répliques pour touristes de villages des minorités ethniques de Chine. A Kunming, la capitale du Yunnan, vous pouvez aussi visiter le village des minorités ( minzu cun ) ou des jeunes gens issus de différentes minorités du Yunnan dansent sommairement sur des musiques pré-enregistrées pour amuser les touristes, sans aucune compétence musicale particulière, l'essentiel est fait de costumes colores et de danses ou les touristes finissent par mimer ce qu'ils perçoivent comme des danses authentiques. Vous pourrez ainsi danser avec les Yis, les Hanis, les Tibétains ou autres. Siem Reap la ville en pleine expansion a cote des temples d'Angkhor au Cambodge a aussi son parc d'amusement, plus primaire, le carton-pâte simule les temples, mais pour démontrer d'une diversité ethnique a la mode, ils ont aussi un coin dédié aux minorités du Ratanakiri, ils n'emploient pas de véritables membres de communautés ethniques, mais de jeunes khmers qui se déguisent en sauvages et poussent des cris plus proches de ceux des animaux, ces pauvres acteurs n'ont aucune idée des populations qu'ils sont censés représenter.

En Chine au moins la trivialisation a des limites, puisque les acteurs musiciens sont de vrais membres de communautés ethniques, ils s'en tiennent a simplifier leur culture pour le plaisir du touriste qui les prends en photo a longueur de journée. Il est vrai qu'avec 8 ou 9% de la population chinoise n'étant pas Han, les 123 millions de personnes ( chiffre publie par Marijo Demers dans son article "le sort des minorités ethniques" dans Relations de juin 2008 au Canada ) avec une identité plus ou moins prononcée comme minoritaire constituent un réservoir suffisant pour y trouver des acteurs danseurs/chanteurs/musiciens. Ces spectacles sont conçus pour les masses de touristes hans, qui profitent de leur statut social et présentent tous les artifices du touriste en short et appareil photo et consommateurs de souvenirs en plastique, ils sont globalement ignorants et ce temps libre passe dans un parc d'attraction renforce ce sentiment de puissance de l'individu moderne qui a le temps et l'argent d'être non productif dans un monde industriel et de contempler les éléments arriérés de la société chinoise.


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Le processus de visite de ce type de parc mène a une distanciation et une vision déformée de la réalité culturelle ethnique, il n'est pas question d'appréciation de cultures différentes, mais d'une batardisation, une simplification ludique de comportements sociaux culturels bien plus complexes. L'essence même de ces cultures n'existe plus, il ne reste plus que des marionnettes en chair et en os qui sont la pour divertir. A Kunming l'entrée au parc d'attractions intitule villages des minorités coute 70 rmb ( 7 ou 8 euros) et des cars de voyages organises y déversent quotidiennement des tonnes de gens, tandis que le musée des minorités plutôt bien , de l'autre cote de la route est désert et ne coute que 10 rmb ( un peu plus d'un euro).

En Chine le phénomène du tourisme ethnique s'étend a de nombreuses zones ethniques, déjà exploitées ou en passe de le devenir. Le Tibet est la destination numéro un des touristes les plus riches, il faut s'y rendre en avion ou en train climatisé high tech, et c'est le top pour un couple Han en lune de miel. Les occidentaux doivent obtenir un permis spécial qui coute au moins 200 euros et les restrictions empêchent le touriste individuel de s'y rendre, sans compter un parcours balisé, pas question de sortir des axes autorises. Les autorités chinoises se méfient de plus en plus des occidentaux qui ont la fâcheuse tendance d'être sympathisants de la cause pro indépendantiste. On pourrait naïvement croire que puisque la Chine s'est ouverte depuis les 20 dernières années, il en est de même quant a sa politique au Tibet, c'est malheureusement tout le contraire, depuis 2000 une campagne d'éducation civique contraint un grand nombre de tibétains, essentiellement dans les monastères a officiellement déclarer que le Dalai Lama est un traitre a la nation chinoise. Le refus d'obtempérer est la principale cause d'emprisonnement politique au Tibet. Mais le Tibet est un sujet largement repris par les médias occidentaux, souvent n'importe comment et les occidentaux ignorent en général l'existence de populations tibétaines musulmanes ou animistes. Ne m'étant jamais rendu au Tibet, je ne préfère pas en parler davantage.

Le Xinjiang (ou Turkestan oriental ) est surement la première zone extrêmement sensible en terme de conflit ethnique, il s'agit d'ailleurs de la plus grande province en Chine, s'étendant de la Mongolie a l'Afghanistan. Les Hans que j'interroge sur les événements de février 1997 a Ili, me déclarent ignorer de quoi je parle ou font allusion a des indépendantistes dangereux. Si je pose la même question a des gens de minorités ethniques locales essentiellement ouïghours et kazakhs, ils connaissent l'évènement tragique auquel je fais référence. Quelques centaines de personnes manifestaient calmement pour dénoncer le chômage comme politique d'exclusion du développement surtout pris en main par les Hans, ils furent emmenés dans le stade de sport, déshabillés et nus asperges d'eau, par une température inférieure a zéro. Ceux qui ne sont pas morts sur place ont été emprisonnés. Le Xinjiang vit dans ce climat de paranoïa de rebelles indépendantistes et de trafic de drogue. Des unités anti-terroristes patrouillent, les hans sont arrives en masse depuis les années 90, auparavant les colons hans étaient une minorité et plutôt pauvres, ils n'étaient pas perçus comme une menace par les autres groupes ethniques. La situation a beaucoup changé, les hans se croient désormais supérieurs, grâce a l'industrialisation et l'expansion de la société de consommation qu'ils comptent bien imposer a toute la Chine.

Comme étranger j'y rencontre certaines difficultés et méfiance des autorités ( les policiers zélés qui me font perdre mon temps ne sont pas forcement Hans, mais kazakhs ou ouïghours ) les zones qui m'intéressent ne sont absolument pas touristiques et l'étranger que je suis, attire tous les regards. Il faut savoir que depuis les jeux olympiques de 2008, une nouvelle loi contraint les étrangers dans toute la Chine a se déclarer auprès de la police dans les 24 heures suivant son arrivée, pour moi qui voyage constamment, cette réglementation est une perte de temps, surtout si la police locale se permet un interrogatoire de plusieurs heures pour bien me dégoûter d'avoir fait le déplacement et de régulièrement me rappeler que puisque Sarkozy a rencontre le Dalai Lama, ils doivent se méfier des français. Ici je rencontre un certain nombre de musiciens des groupes ethniques qui relèvent cette contradiction entre la volonté affichée des autorités de promouvoir toutes ces cultures et le manque d'intérêt et de moyens pour y parvenir. La corruption des élites politiques administratives, responsables culturels fait que les fonds dédiés a la culture disparaissent en banquets, ce qu'on nomme frais de bouche en France.

L'autre réel problème est la centralisation des décideurs culturels qui non seulement n'organisent que pour amuser les dirigeants du parti de passage, mais empêchent toute initiative privée d'organiser des événements culturels dans une société multi-ethnique de plus en plus commerciale. Je me suis rendu a un soit disant festival culturel dans les zones de pâturage de haute montagne a Karajun ou la finalité était d'avoir le maximum de figurants kazaks non rémunérés pour le tournage d'un film, une fiction cliche du monde kazak. Événement aussitôt récupéré par le pouvoir local qui y tient ces discours interminables pleins de bonnes intentions, alors qu'une fois de plus on se trouve dans une situation contradictoire avec d'un cote la glorification d'une société de nomades a cheval vivant dans leur kikzus ( les tentes rondes communes aux Mongols et Kazaks ) et la réalité de la délocalisation permanente de minorités qui sont sédentarisées de force.

J'assiste en regardant les informations de la télévision locale a ces scènes ou des kazaks convertis de force aux joies de l'agriculture, peu souriants doivent déclarer en rang d'ognons la pelle sur l'épaule qu'ils étaient sans travail démunis dans le froid des montagnes et que le gouvernement bienveillant les a donc déplacés dans les plaines pour devenir des ouvriers agricoles. Quand j'interroge les gens sur le terrain tout le monde incluant les hans me déclarent qu'un ouvrier agricole est un être misérable tandis que les nomades ont des troupeaux considérables de moutons, vaches et chevaux, un patrimoine économique non négligeable. Dans ces conditions, la volonté d'un pouvoir répressif semble plus exprimer une volonté de contrôle de populations trop libres que d'une réelle politique de développement. Un détail symbolique illustre ce décalage, au Xinjiang les Hans fonctionnent avec l'heure de Pékin, tandis que les autres fonctionnent avec l'heure plus proche de la réalité du soleil, 2 heures plus tard, lorsque l'on demande l'heure a un Han, on obtient donc comme réponse l'heure de la capitale, ils déjeunent a 2 h de l'après-midi, tandis que les autres déjeunent a midi. A 4000 km a l'ouest de la capitale, le pouvoir de Pékin n'applique pas seulement des mesures politiques et économiques de gestion coloniale, il amène avec lui ses horaires.

Ici comme ailleurs en Chine, je rencontre des musiciens qui ont travaillé dans les années 80, 90 ou 2000 pour les institutions culturelles officielles, ils sont souvent talentueux mais ont tous abandonné ce travail par lassitude, après des années ou leur rôle se cantonnait a jouer pour les officiels du gouvernement, les plus présentables ont pu se rendre une ou 2 fois a Beijing pour un show télévisé de CCTV. Aucun d'entre eux n'a été enregistré correctement, l'essentiel du temps aucune trace sonore n'existe de leur existence. Ils sont devenus des fonctionnaires de la culture, ce qui leur a permis comme a chaque fonctionnaire d'obtenir un logement de fonction.

Les institutions culturelles officielles sont le plus souvent composées de personnel issu de minorités ethniques, on y trouve toutes sortes de comportements, du fonctionnaire zélé, au contemplatif démotivé, et j'y rencontre parfois des gens prêts a m'aider, ils sont mal payés et quand ils ont effectués des enregistrements qui témoignent du passé, la qualité des prises de son sur cassettes audio est extrêmement médiocre, inutilisables : personne ne les écoute.

Récemment l'acquisition de matériel moderne d'enregistrements a un prix douteusement élevé ( histoire de fausses factures pour détourner de l argent ) ne semble pas aider a réaliser de nouveaux enregistrements. Heureusement quelques exceptions existent, des projets menés a bien par des gens compétents comme le coffret de 24 cds des 12 MUQUAM, qui témoigne de la diversité des musiques et poésie ouïghoures, réalisé par le ministère de la culture. Je rencontre des jeunes, souvent issus de famille de musiciens qui s'endettent pour pouvoir étudier la musique a l'université des beaux arts d'Urumqi, après 4 ans d'études, même ceux qui reçoivent des premiers prix sont au chômage.


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Revenons au problème de la trivialisation de la représentation qu'est faite des minorités ethniques en Chine, mon problème est le vide entre mes expériences sur le terrain et les versions simplifiées que les médias chinois proposent. La destruction de la culture chinoise a commence au début du 20eme siècle, mais je vais y revenir plus tard. L'industrie du tourisme ethnique a pour finalité la réussite encadrée des vacances, la joie de rencontres superficielles avec ces gens colorés qui chantent et dansent pour notre plaisir, ces femmes souriantes voire faciles, comme les Mosuo cette société matriarcale ou les femmes auraient une plus grande liberté sexuelle, un cliche attrayant pour le touriste masculin. Tout ça exclut des chants mélancoliques au profit d'une légèreté affirmée, ou les touristes finissent main dans la main avec leur hôtes ethniques en dansant autour d'un feu, une farandole ou une danse des canards ! Mon amie journaliste chinoise écrivait il y a 10 ans pour un magazine du style GEO ou National Geographic version chinoise un article sur les musiques des minorités musulmanes du Xinjiang, abordant la mélancolie de nombreuses chansons kazakhes ou ouïghoures. Le patron du groupe de presse lui demanda de changer son texte, pour mettre en valeur les thèmes plus flatteurs de gaieté inopérante a ce peuple de joyeux lurons. Sa seule connaissance de la musique ouïghoure était due aux cliches développés par les médias chinois. Soit elle modifiait son article soit elle était virée. Il faut tout d'abord expliquer qu'en Chine , il est très rare de trouver des CDs audio de musique ethnique et que l'essentiel du patrimoine musical est transmis par les VCDs ou DVDs a une culture audio visuelle, ou l'authenticité de la musique est le dernier des soucis, la priorité est de voir des femmes costumées belles et joyeuses.

En décembre 2007 j'ai lu un article dans un magazine qui traitait du récent développement touristique du plateau central du Vietnam, ou les importants groupes ethniques de la région comme les Bahnars, Edes ou Jarais pour ne citer que ces 3 groupes, utilisent des ensembles de gongs comme principale pratique musicale et animiste. Cette région, considérable productrice de café, s'ouvre depuis peu au tourisme ethnique encadré. L'article écrit en anglais décrivait deux types d'attentes de la part des touristes, la première concernant les touristes vietnamiens qui souhaitent entendre des thèmes connus de leur culture pop repris par les gongs, et la deuxième celle des touristes occidentaux et des groupes ethniques eux mêmes qui souhaitaient entendre des versions originales non trafiquées, des pratiques authentiques d'ensembles de gongs.

Au Vietnam comme au Laos, il est plutôt difficile pour un occidental d'échapper au tourisme organisé et de se rendre a son gré ou on le souhaite. Il est interdit de passer la nuit dans un village de minorités , a moins d'être accompagné d'un guide ressortissant du pays, en général un lao au Laos et un kinh au Vietnam, qui ne parlent pas la langue du groupe ethnique visite. Une bureaucratie inhospitalière est la pour vous décourager d'obtenir les permis nécessaires a un tel voyage, pour des raisons politiques les zones du plateau central au Vietnam et quantité de zones ethniques du Laos sont interdites d'accès aux étrangers qui comme moi ne travaillent pas pour des organisations locales. Les territoires Hmongs ou la province d'Attapeu au Laos sont des exemples concrets ou les autorités locales me refusèrent l'accès. Au même moment la petite ville d'Attapeu était envahie par 200 chinois qui participaient a la ruée vers l'or, retournant toute la caillasse de la rivière Xekong, regardés avec méfiance par les populations locales.
Dans d'autres contrées laotiennes ( les laos ne représentent que 35% de la population du Laos ) depuis 2000 un grand programme de délocalisation des minorités ethniques a été entrepris avec l'aide de toutes sortes d'ONGs occidentales pour déplacer des populations du territoire de leurs ancêtres, pour les établir au bord des routes, afin de les sédentariser dans des endroits ou ils se sont considérablement appauvris, tandis que les ressources forestières de ces territoires ont été pillées pour l'export vers le Vietnam et la Chine.

En Chine au moins, on me laisse faire mon travail, un travail de recherches en marge de l'industrie touristique et des institutions culturelles gouvernementales ( qui m'accueillent gentiment ou se méfient d'une concurrence étrangère), dont le but essentiel est la promotion et le développement du potentiel touristique. Les « palais de la culture » chinois établis un peu partout en zones ethniques ont pour finalité l'apprentissage et la mise en scène de spectacles de danses ethniques, avec un message de préservation du patrimoine culturel comme couverture médiatique. Certes quelques jeunes ont la chance d'y apprendre certaines techniques musicales. Ces institutions travaillent avec un professeur de musique, qui souvent n'hésite pas a réécrire la musique locale en une version plus a la mode, plus acceptable ou les bonnes mœurs approuvées par la dialectique culturelle du parti sont honorées. Un filtrage culturel est en place depuis les années 50, avec la création de troupes officielles qui sont la pour simplifier et représenter auprès de la majorité han, des pratiques culturelles des minorités.

Helen Rees une ethnomusicologue de l'université californienne d UCLA, explique dans son livre sur la musique Naxi "echoes of history" dans son chapitre « ethnic minorities and the chinese state » que les recherches et arrangements des musiques de minorités ont commence dans les années 50 et que la création des troupes d'état sur le modèle soviétique de groupes de danse et chants avait pour but de représenter des pratiques culturelles lavées de ses éléments érotiques et rituels religieux, juges non acceptables pour le parti comme pour les sensibilités rigides des Hans. Les troupes culturelles du Xinjiang créées en 1950, du groupe ethnique Zhuang du Guangxi crée en 1954, du Tibet en 1958, et la troupe du Yunnan regroupant les Dehong, Dai et Jingpo crée en 1956 ont élaboré des cette époque des performances incluant ce qui était acceptable et divertissant avec l'ajout de messages pro-communistes et sur l'unité de la nation chinoise multi-ethnique, standardisant les cultures ethniques en catégories et normes articulées par le parti.

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Pour les festivals officiels, les organisateurs sélectionnent une forme artistique représentative de chaque groupe ethnique, institutionnalisant une pratique culturelle standardisée, les Dais du Xichuan bana par exemple, sont indissociables pour le public chinois, de la danse du paon, les Miao du Guizhou pour leurs orchestres d'orgues a bouche ( lusheng), les Naxi du Yunnan pour leur danse Dongba. Or au niveau amateur sur le terrain et non dans les théâtres de la représentation officielle, cette standardisation est beaucoup moins prononcée et une diversité de formes, d'instruments persiste. Il y a une grande différence entre le cliché ethnique entretenu dans la culture dominante et la réalité des pratiques culturelles des minorités. Ainsi parfois, nos interlocuteurs de minorités ( les gens que je souhaite enregistrer ) commencent par ces cliches, nous ( ma compagne Shi Tanding et moi ) devons alors expliquer nos intentions d enregistrer des pratiques musicales internes au village et non destinées a l'outsider ni a correspondre aux clichés qui façonnent leur identité a l'extérieur de la communauté. Helen Rees explique les différents cliches développés par les Hans concernant les minorités ethniques, un grand nombre de publications chinoises impriment le commentaire suivant : bons chanteurs et bons danseurs ( neng ge shan wu ) sans guère plus d informations.

Les films, la télévision autant que les médias imprimés font systématiquement la promotion de ces images colorées, dressant un portrait de gens toujours prêts a chanter et danser, depuis les années 50 le cinéma chinois a « glamourisé » l'exotique des minorités ethniques, un monde d'autochtones souriants. En 2007 j'ai regardé sur la chaine de télé CCTV la célébration du nouvel an chinois, un show de variâtes qui occupe toute la soirée, compose de 90% de représentations de groupes ethniques, chaque groupe ethnique présentant son cliché exotique fait de danses chorégraphiées au gout du jour et, portant les plus beaux costumes, les hommes et les femmes sont systématiquement jeunes, beaux et très dynamiques dans leur exécution des danses, devant une salle remplie de milliers de dignitaires Hans en costume gris conservateur, ici pas question d'une vieille grand mère ridée chantant au coin du feu dans une maison délabrée. La plupart des médias chinois continuent de stimuler les motifs exotiques des minorités comme chanteurs, danseurs et le gouvernement fait la promotion des festivals traditionnels, des rituels annuels ou le contenu religieux ou animiste a été extrait, se déroulent dans des stades ou les minorités finissent par des chansons célébrant la gloire du parti. Ces festivals officiels, la mise en valeur des costumes et l'inévitable danse en cercle sont devenus la principale vison du profil ethnique dans les consciences des Hans informes par la télévision.
Le Han est sérieux, technologiquement développé et l'individu de minorités, attardé dans l'histoire, est la pour le divertir. Une vision simpliste contredite par mes expériences sur le terrain, j'ai surtout l'occasion de rencontrer des hans d'une ignorance extrême satisfaits de quelques clichés qu'ils considèrent comme culture générale, résultat du lavage de cerveaux a grande échelle qui continue de sévir en Chine.

Faire la distinction entre le produit commercial destiné a satisfaire les touristes et la version originale dans le cadre du village non touristique, n'est pas toujours chose facile. Prenons plutôt comme image la juxtaposition de 2 territoires culturels sans frontière définie ou certaines zones limitrophes se superposent, se mélangent, le premier territoire accessible par la grande route est accueillant moyennant le ticket d'entrée, les autochtones y proposent dans le cadre de spectacles mis en scène, des produits déjà plus ou moins connus ou les codifications musicales sont acceptées d'emblée par le touriste puisqu'il y reconnait des éléments empruntes a la musique pop chinoise avec lequel il est familier, les hôtes feront même l'effort d'y chanter en mandarin pour n'exclure personne. Le deuxième territoire est moins facile d'accès, il faudra peut être une journée de marche en montagne pour y accéder, souvent plus la distance parcourue dans ce deuxième territoire est grande, moins les repères commerciaux y seront perceptibles, cela ne veut pas dire qu'on va y trouver des musiques préhistoriques, ces territoires ont aussi subi des transformations internes avec des apports extérieurs inévitables, mais pas dans un but de commercialisation. Ici la musique est jouée par des paysans et ne rapporte pas d'argent, les personnes âgées de ces territoires s'y expriment musicalement avec d'autres codes esthétiques que les nouvelles générations plus mobiles qui se sont promenées sur les 2 territoires dont je parle. L'influence du premier territoire sur le deuxième n'a jamais été aussi importante dans l'histoire, grâce aux téléviseurs fabriques dans le premier territoire et importes dans le deuxième territoire, les nouveaux codes culturels seront bientôt acceptes presque partout et remplaceront les anciennes pratiques culturelles sans avoir forcé personne, juste adapter au gout du jour.

Les nouvelles versions sont souvent plus dynamiques, moins mélancoliques, les styles de chant se standardisent, largement inspires de ce qui se fait dans la pop chinoise, tout ce que je déteste. Ces attentes du monde moderne s'infiltrent partout, je fus approche par un tour opérateur français au Cambodge en 2004, qui me rencontrant songea a inclure, dans le sac de cadeaux qu'il distribue a ses clients, un CD d'enregistrements de musique traditionnelle. Après avoir écouté le CD de compilation que je lui proposais il changea d avis, trouvant ces musiques et chants particulièrement non commerciales, il ne souhaitait pas faire connaitre ces musiques a des retraités français qui se rendent au Cambodge pour visiter les temples d Angkhor, une fois de plus j'étais hors sujet.

Les 20 dernières années , l'industrie discographique mondiale a produit des tonnes de produits musicaux de fusion, l'inclusion d'éléments exotiques associée a des techniques de production musicale modernes occidentales est devenu un genre. Produit par des occidentaux, des africains, des indiens, et d'autres, tous les continents semblent avoir remixé leur cultures traditionnelles avec plus ou moins de talent et de succès, grâce a l'utilisation de techniques de programing/sampling utilisés dans n'importe quel studio avec l'apport d'éléments exotiques. Ces produits commerciaux ont eu une influence décisive sur la fabrication et la perception, compréhension de ce qu'on nomme désormais la world music. Un nombre considérable de grands musiciens traditionnels se sont mis au gout du jour, laissant derrière les arriérés qui n'ont pas su se moderniser. De nombreuses musiques empruntent une terminologie qui n'a rien a voir avec la signification première des termes employés, par exemple les termes de trance ou de tribal sont utilises de nos jours a tort et a travers pour designer des musiques qui n'ont rien de tribal au sens premier.



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Un autre aspect du problème concerne les crises identitaires que traversent les nouvelles générations installées en occident. J'étais par exemple en contact sur internet avec une association culturelle hmong au Minnesota aux États-Unis et en écoutant les groupes qui se présentaient comme Hmong, alors que rien ne les distinguait de n'importe quel groupe de rock blanc, je leur ai demandé quelle était leur spécificité hmong, ils n ont pas vraiment apprécié me répondant que ce n'était pas a moi de décider ce qui était hmong ! Un difficile débat culturel ou je suis vite considéré comme arrogant, j'essaie juste d'ouvrir une discussion, d'exprimer des doutes et ne désire pas définir ce qui est ou pas original, ce n'est pas mon rôle, je ne suis en aucun cas une autorité en la matière. Mais je suis confronté a toutes sortes de situations.  
Un autre exemple au Cambodge , qui implique cette fois les missionnaires chrétiens, ces derniers sont en général américains, ont des moyens financiers importants qui leur permettent d'embaucher des linguistes chrétiens dont le rôle un peu partout dans le monde est de traduire la Bible dans toutes les langues, même parmi des groupes ethniques minuscules. Un missionnaire américain installe a Banlung, la ville du Ratanakiri au nord-est du Cambodge m'invita chez lui et me fit écouter ses enregistrements de chants Tampoon. Ils paraissaient originaux, utilisant des paternes mélodiques typiquement Tampoon, si ce n'est que les textes avaient été modifiés par la chanteuse convertie au christianisme et remplacés par des messages de prosélytisme chrétien, le missionnaire croyait qu'il aidait ainsi a préserver des aspects de la culture tampoon. Il oubliait de mentionner que les Tampoons convertis au christianisme abandonnent la pratique musicale des ensembles de gongs qui ont pour finalité première d'être en contact avec les esprits, or les pratiques animistes ne sont pas tolérées par ces missionnaires.

Une partie importante de la population des Nus au nord ouest du Yunnan en Chine se sont convertis au christianisme sous l'influence de missionnaires américains au début du 20ème siècle, peut-on considérer que ces Nus produisent encore de la musique traditionnelle pour autant ? Ce n'est pas a moi de répondre, j'applique juste mes critères subjectifs pour décider si ces musiques m'intéressent ou non. Dans le cas précis je ne souhaite pas enregistrer des musiques qui se prétendent chrétiennes, pas plus que des hymnes au parti communiste chinois. Je n'ai de compte a rendre a personne, seules des musiques que je sélectionne selon certains critères esthétiques m'intéressent. Par ailleurs, je suis collectionneur de toutes sortes d'enregistrements ethniques effectués par d autres passionnes. En ce qui concerne la province du Yunnan, un seul nom s'impose, celui de Zhang Xing Rong, un professeur de musique, désormais a la retraite, de l'université des beaux arts de Kunming, qui durant une vingtaine d'années a réalisé des enregistrements des minorités ethniques du Yunnan, au debut avec des moyens rudimentaires utilisant un appareil radio cassette, puis avec l'aide d'étrangers avec du matériel plus sérieux. Grâce a lui j'en sais plus sur la diversité musicale du Yunnan, je suis particulièrement impressionne par les polyphonies vocales et l'instrumentation très japonaise du sous groupe des Baina Hani au sud de Honghe. Je souhaitais en savoir plus et il m'a déclaré en novembre 2008 que ces chants de transplantation du riz sont maintenant introuvables, ces enregistrements des années 90 font déjà partie de l'histoire révolue. Des styles musicaux disparaissent, tout le monde le sait et en incombe la faute au progrès, avec l'article de Isabel k.f Wong dans le livre américain "excursions in world music" j appris que la destruction ou la rénovation de la culture chinoise est un phénomène qui commence au début du 20ème siècle.

J'ai précédemment abordé la perception que les masses chinoises peuvent avoir des musiques de minorités, maintenant j'aimerais aussi traiter de la conception et du développement de leur propre musique durant le XXème siècle. Depuis les années 80, la musique pop chinoise a pratiquement éclipsé toutes formes de musique traditionnelle. Ce concept de pop-music chinoise débute dans le Shanghai des années 20 avec une mixture de jazz, de chansons de films hollywoodiens et de ballades populaires urbaines chinoises appelées xiao diao. De nos jours la musique de variété chinoise a envahie toutes les sphères de la société chinoise, impossible d'échapper aux sons provenant des magasins ou des appartements, diffusée dans les rues, les bus, a la télé bien sur ou utilisée comme sonnerie des téléphones portables, et glorifiée dans la pratique du karaoke ( orchestre vide en japonais ) ou l'individu s'exprime dans cette culture codifiée de masse. Le karaoke met autant en valeur le visuel que l'audio.


shitanding-20090210205845830.jpgEcoute de sons enregistrés par Laurent sur dongmen la porte est de Dali

Revenons au début du 20ème siècle, une période de reformes politiques, sociales et bien sur culturelles. C'est ce dernier plan que je souhaite aborder, des académiciens renommes comme Kang You Wei et Liang Qi Chao ont rénové l'apprentissage dans les écoles par de nouvelles chansons scolaires avec une mélodie simpliste et des textes didactiques, comme dans les écoles occidentales ou japonaises, afin d'inculquer une nouvelle éthique de discipline et de nationalisme. Les réformateurs affirmaient que la musique traditionnelle chinoise était languide et passive et donc inappropriée pour l usage dans les écoles. Fei Shi parlait de reformer la musique chinoise et de créer une musique accessible a tous les chinois incluant les enfants. Les écoles commencèrent par adapter des chansons des écoles des missionnaires chrétiens en Chine, et des chansons des écoles japonaises, un grand nombre d'étudiants chinois étudiaient au début du siècle au Japon, a leur retour en Chine, ceux qui y avaient étudié la musique, commencèrent a écrire des chansons didactiques pour les écoles. Courtes et simples elles avaient souvent la forme de marches militaires, faites de rythmes syllabiques, reflétant l'influence directe des chansons d'écoles japonaises, les textes étaient faits de messages simples et directs mettant en valeur le patriotisme, l'auto discipline, l'esprit civique et militaire, le genre moderne des chansons chinoises était ne !
Durant les décennies a venir et jusqu'à récemment, les descendantes des chansons didactiques sont devenues l'essentiel des chansons absorbées par les étudiants chinois, ces chansons peuvent être considérées comme les prédécesseurs des chansons politiques a venir comme chansons révolutionnaires et plus tard chansons pour les masses développées par les communistes.
Cai Yuan Pei fondateur du mouvement du 4 mai et contemporain de Fei Shi croyait fermement a l'inclusion d'éléments de musique occidentale pour moderniser la musique chinoise, et maintenir une façade chinoise, illustrant le slogan de 1898: maintenir l'essence de la culture chinoise avec l'aide pratique du savoir occidental.

Depuis des temps très anciens, la musique était traditionnellement traitée comme un des éléments devant être combiné a un a environnement particulier. La musique, outre le fait qu'elle exprime des émotions joyeuses ou tristes ou étant un véhicule de contemplation religieuse et spirituelle, se devait d'être intégrée a des événements comme les rituels, banquets, mariages, funérailles, festivals ou célébrations de récoltes. De plus la musique était conçue comme partie intégrante du théâtre ou de la danse, mais perçue uniquement comme élément a une pratique culturelle plus large et non comme une expression suffisante a elle seule. Écouter pour le simple plaisir d'écouter est une pratique plutôt rare en Chine. L'essentiel des musiques chinoises était anonyme, un matériel populaire transmis oralement ou fait d'annotations écrites manuellement plutôt que d'ouvrages imprimés, qui graduellement se transforma de copies en adaptations.

Avant 1949, le statut du musicien était déterminé par son éducation et rang social, un musicien professionnel avait un statut social inférieur, surtout ceux dont la tache musicale était de divertir les banquets des gens non lettres. Contrairement au professionnel, le musicien amateur ne dépendait pas de son activité musicale pour vivre, il était plutôt d origine sociale aisée, l'aristocrate éduqué pour qui la musique était une des façons d'exprimer son statut de gentleman, au même titre que la calligraphie ou la peinture, certains devinrent des musiciens renommes et les textes écrits témoignent de la qualité de leur art, tandis que les musiciens professionnels ( des techniciens plutôt que des créatifs )sont très peu considérés par la littérature chinoise des siècles passés.

Au début du 20ème siècle la création de chansons fut une nouvelle phase de développement du langage vernaculaire et de la popularisation d'une nouvelle sorte de divertissements, des spectacles de danse mis en scène a la production d'une industrie du disque naissante. Dans les années 30 la maison de disques française Pathé a Shanghai monopolisait le marché. Le parti communiste chinois fondé en 1921 par un des leaders du mouvement du 4 mai, considérait d'entrée que les arts et la musique étaient d'un point de vue marxiste-leniniste des instruments importants de la propagation de la propagande politique. L'accroissement de l'invasion japonaise a stimulé encore plus de chansons de protestation qui ont résonné durant les décennies a venir dans les films de guerre, devenant très populaires et constituant un média considérable de la propagande après 1949.

La production de milliers de chansons pour les masses devint une fonction importante de la machine de propagande du parti, interprétant la musique comme un moyen de propagation de l'idéologie officielle et rien d'autre. Mao comme Confucius définissent la musique en 2 catégories, celle qui contient un message idéologique correct ou celle qui comme un poison véhicule des idées pernicieuses et influence des comportements néfastes ( issus d'une société féodale discréditée ou de l'occident décadent ). Mao adorait danser a l'occidentale sur une sorte de sous jazz aseptisé.

Heureusement a l'écart de toute cette culture officielle, des pratiques musicales indépendantes se sont perpétuées en Chine, la raison principale qui me motive a rester dans ce pays trop liberticide a mon gout ( je profite de l'occasion pour rappeler a tous les amateurs de sport que les jeux olympiques de Beijing ont permis a la Chine de faire un grand pas en arrière en matière de liberté, tous les concerts furent interdits de juin a octobre 2008 et il était également interdit d'envoyer des CDs par la poste en Chine comme a l'étranger, j'ai donc pendant 5 mois été contraint de ne plus vendre mes CDs d'enregistrements ethniques aux gens qui souhaitaient les acquérir ). Depuis septembre 2006, j ai réalisé avec l'aide de ma compagne Shi Tanding de nombreux enregistrements en Chine, dont vous trouvez la liste ci dessous . Autour du lac Lugu, au nord du Yunnan nous avons enregistre les chants MOSUO et PUMI ainsi que des rites de bouddhisme tibetain MOSUO, puis dans le sud du Sichuan, un endroit appelle Da Liangshan, des chants NUOSU (YI), autour de Muli toujours au sud Sichuan des chants et orgues a bouche HUA MIAO (HMONG), au sud Guizhou chez différents sous groupes MIAO (HMONG) nous avons enregistré des chants, des gu piao qin (instrument a 2 cordes très rare) et des orgues a bouche, puis des polyphonies vocales DONG accompagnées de 2 instruments le Dong pipa (instr
ument a 4 cordes) et la viole a 2 cordes niu tu qin, des chants SHUI, des chants de femmes SHUI MIAO (HMONG), a Midu au Yunnan des polyphonies vocales de 5 femmes LALUO (YI) ainsi que des chants d hommes et une cérémonie de mariage, a Dali au Yunnan différents rituels BAI de Benzhou (religion BAI) avec orchestre Dongjing d'une quinzaine de personnes et chants de femmes, au sud de Honghe au Yunnan de nombreux instruments a cordes et a vent et chants NISU (YI ) en duo instrumental/chanteuse ou en orchestre de 10 personnes, des chants YAO bleus.

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Au Xinjiang dans le préfecture d'Ili chez les OUIGHUR ou il existe une grande diversité d'instruments, nous avons pu enregistrer des instruments a cordes et percussifs (tambour, satar, doutar, rawap, ekjek, roushtar, tchang, dap), chez les KAZAKs différents instruments (dongbra, kobuz) ainsi que des chants AKEN (poetes chanteurs improvisateurs) accompagnes de dongbra, des chants Manasse KIRGIZ accompagne de komuz (instrument a 3 cordes), chez le sous groupe MONGOL des ERUT des chants anciens ainsi qu'un instrument a 2 cordes rare le topchour.

Je suis conscient de l'urgence et j arrive un peu tard, 20 ans plutôt j'aurais pu trouver beaucoup plus de pratiques musicales, certaines déjà disparues, mais 20 ans plutôt les autorités chinoises ne m'auraient pas permis d'effectuer ce travail. Je rencontre de nombreuses difficultés, financières et tout simplement de compréhension des chinois qui n'ont en général aucun intérêt pour ces musiques. D'autre part, je dois faire face a ce que j'appelle le syndrome du blanc, c'est a dire le cliché répandu que l'occidental est riche et qu'il est facile pour moi de vivre a l'aise, alors que je suis depuis des années dans une situation de survie, investissant mes faibles bénéfices dans du matériel me permettant de travailler correctement, de produire des CDs dont la vente me permet de continuer. Les autorités chinoises ou même les individus ne semblent pas comprendre ma situation instable d'indépendant et s'imaginent systématiquement que j'obtiens un salaire mensuel par une fondation occidentale pour effectuer ce travail, j'aimerais bien !!!!

Sous le nom KINK GONG vous trouvez 2 activités complémentaires, la première consiste a enregistrer des groupes ethniques minoritaires, surtout en Asie du sud-est, la seconde est un travail de transformation des enregistrements originaux pour créer de la musique électronique et acoustique expérimentale. Depuis 1992 j'habite de nombreux endroits , souvent reculés en Inde, Indonésie, Tanzanie, Cambodge, Laos, Vietnam et Chine, afin d'y trouver des musiques traditionnelles qui m'intéressent. Chaque pays ou je m'installe offre un contexte différent, mon approche est différente aussi selon le temps que j'y passe, le degré d'intimité que je peux avoir avec les gens que j'enregistre, des expériences fluctuantes selon le degré d'acculturation, la difficulté de trouver des musiciens, la situation politique du pays, le fait de travailler seul ou avec des anthropologues et tout un tas de raisons subjectives sur l'esthétique des musiques enregistrées.

J'investis mon temps, mon argent et mon énergie pour trouver ces musiques que j'aime, dans la plupart des cas je suis le premier a enregistrer des gens qui vivent relativement isolés, je n'ai ni les moyens ni le gout des studios, tous mes enregistrements sont effectués sur le terrain. Je suis conscient des grandes déclarations de l'UNESCO ou des slogans de multiples ONGs prétendant préserver les cultures indigènes, je ne prétendrais en aucun cas faire ce travail pour préserver des cultures de groupes ethniques menacés de toutes parts et je ne crois pas avoir une influence consistante sur des personnes pour préserver leur culture. Je fais donc ces enregistrements essentiellement pour la beauté de sonorités, de textures, de structures tellement différentes des musiques banalement commerciales qui polluent le monde du son en Chine ou ailleurs. Je n'ai pas de crédits académiques, n'ai jamais étudié ni l'ethnomusicologie ni l'anthropologie, mais finalement me baigne dans les mêmes sources.
J'ai avec l'aide de ma femme chinoise SHI TANDING, en 2007 monte mon propre label qui contient une cinquantaine de CDs de mes enregistrements et c'est devenu notre principale activité et source de revenus pour continuer a se rendre dans des endroits reculés et y trouver des musiciens, chanteurs, nous sommes installes a Dali dans l'ouest de la province du Yunnan, ce qui nous permet d'accéder relativement facilement dans tout le sud de la Chine ou des centaines de pratiques musicales persistent a l'écart des modes urbaines. J ai la chance de vivre ma passion de ces musiques et chants. Les pros de l'ethnomusicologie se sont raréfiés par le manque de gratifications financières a effectuer ce type d enregistrements et vendre peu de CDs, c'est donc a un amateur que la tache incombe ! Un amateur qui se professionnalise sur le terrain des minorités ethniques d'Asie du sud est. J'ai encore énormément de découvertes musicales a faire alors je continue.

Pour l instant, pour decouvrir toutes les musiques ci dessous, n hesitez pas a me contacter : kinkgong at gmail.com www.myspace.com/kinkgong

Chaque CD comporte une photo et un texte explicatif

TANZANIA:

CD DATOGA SONGS RECORDED NEAR LAKE EYASI 2000
CD HADZA MALIMBA,ZEZE,SONGS RECORDED NEAR LAKE EYASI 1999 2000
to be released later on in 2009 : CD MAKONDE CEREMONY/ MUSLIM CEREMONY RECORDED IN MSEMBATI


2000 CAMBODIA :

CD JARAI AYIN AYON LOVE SONGS RECORDED IN RATANAKIRI CAMBODIA 2003
CD BRAO / KRUNG SONGS, INSTRUMENTS RECORDED IN RATANAKIRI 2003 2004 2005 CD TAMPOON SONGS,GUNGTENG VOL 1 RECORDED IN RATANAKIRI 2003 2004
CD TAMPOON SONGS,GUNGTENG VOL 2 RECORDED IN RATANAKIRI 2004 2005
CD KRUNG BRATANEUL RICE HARVEST CEREMONY RECORDED IN KRAPEU RATANAKIRI 2003
CD KAVET GONGS RECORDED IN LALAI RATANAKIRI 2004
CD KRUNG FUNERAL CEREMONY RECORDED IN KROLA RATANAKIRI 2004
CD KRUNG GONGS RECORDED IN RATANAKIRI 2004 2005
CD PHNONG INSTRUMENTS RECORDED IN MONDOLKIRI 2007
CD PHNONG GONGS RECORDED IN BUTANG MONDOLKIRI 2005
CD JARAI FUNERAL/WEDDING RECORDED IN TANGJI RATANAKIRI 2004 2006
to be released later on in 2009 : CD PHNONG GONGS VOL 2 RECORDED IN PULONG MONDOLKIRI 2005
CD KHMER QUARTET RECORDED IN BANLUNG RATANAKIRI 2003

LAOS :

CD ATTAPEU PROVINCE IN LAOS ; BRAO KANYING / BRAO HAMONG 2006
CD ATTAPEU PROVINCE IN LAOS ; BRAO KAVET / BRAO JREE 2006
CD CHAMPASAC PROVINCE IN LAOS VOL 1 ; NYAHEUN SONGS 2006
CD CHAMPASAC PROVINCE IN LAOS VOL 2 ; GONGS OF BRAO LAVE / NKRIANG 2006 CD XEKONG PROVINCE IN LAOS ; ARAK / TRIANG / NKRIANG 2006
CD COMPILATION OF THA , A PAIR OF FLAT GONGS , RECORDED IN CAMBODIA AND LAOS BETWEEN 2004 AND 2006
to be released later on in 2009 : CD CHAMPASAC LAO ROYAL COURT MUSIC RECORDED

IN CHAMPASAC 2006 VIETNAM:
CD BLACK HMONG SONGS, MOUTHORGANS VOL 1 RECORDED IN SAPA 2006
CD BLACK HMONG SONGS, INSTRUMENTS VOL 2 RECORDED IN SAPA 2006 2007
CD RED DAO BAOZOO SONGS RECORDED IN SAPA 2006
CD BLACK AND RED DAO BAOZOO SONGS RECORDED IN SAPA 2006
CD GIAY SONGS RECORDED IN SAPA 2006
CD BLACK HMONG SHAMAN CEREMONY RECORDED SAPA 2006
CD BLACK AND FLOWER HANI SONGS RECORDED IN MUONG HUM, SAPA 2007
CD LU SONGS,FLUTES RECORDED IN BINLU 2007
to be released later on in 2009 : CD HANOI ( CA TRU / FUNERAL / STREET MUSIC ) RECORDED IN HANOI 2007

2009 CHINA:
CD MOSUO / PUMI SONGS RECORDED IN LAKE LUGU YUNNAN AND SICHUAN 2006
CD NUOSU (YI) SONGS RECORDED IN YEN YUAN SICHUAN 2006
CD FLOWER MIAO SONGS, MOUTHORGANS RECORDED IN MULI SICHUAN 2006
CD HENAN MOUTHORGAN RECORDED IN SHENZHEN 2007
CD DONG POLYPHONIC SONGS RECORDED IN SHUIZHAI GUIZHOU 2007
CD MIAO GUPIAQIN,SONGS, MOUTHORGANS RECORDED IN DANZHAI GUIZHOU 2007 CD SHUI SONGS RECORDED IN LALAN,SHUILONG GUIZHOU 2007
CD CHANG FO JI, BUDDHIST PRAYERS LOOP MACHINES, 2007
CD LALUO (YI) POLYPHONIC SONGS RECORDED IN MIDU YUNNAN 2007
CD UYGHUR SONGS FROM XINJIANG RECORDED IN DALI YUNNAN 2007
CD SHUI MIAO WOMEN SONGS FROM GUIZHOU KALI, RECORDED IN DALI 2007
CD BAI CEREMONIES, RECORDED IN DALI YUNNAN 2008
CD BAI WOMEN SONGS, RECORDED IN DALI YUNNAN 2008
CD FIELD RECORDINGS IN CHINA 2006 TO 2008
CD TIBETAN SONGS FROM A TAPE BOUGHT IN 1992 IN LITANG SICHUAN
to be released later on in 2009 : CD NISU (YI) SANXIAN SONGS RECORDED IN AZHAHE YUNNAN 2009
CD NISU (YI) ORCHESTRA RECORDED IN AZHAHE YUNNAN 2009
CD YAO SONGS RECORDED IN AZHAHE YUNNAN 2009
CD UYGHUR TAMBUR,SATAR,DOTAR RECORDED IN YINING XINJIANG 2009
CD UYGHUR INSTRUMENTS RECORDED IN YINING XINJIANG 2009
CD KAZAK DONGBRA, KOBUZ RECORDED IN YINING XINJIANG 2009
CD KAZAK AKEN RECORDED IN CHAPCHAR XINJIANG 2009
CD KIRGIZ MANASSE SONGS RECORDED IN TEKES XINJIANG 2009
CD KAZAK DONGBRA RECORDED IN KARAJUN XINJIANG 2009
CD MONGOL ERUT RECORDED IN TEKES/YINING XINJIANG 2009


INDIA:

CD GYPSIES OF RAJASTAN INDIA, FROM A TAPE BOUGHT IN 1996


INDONESIA:

CD MINANG KABAU SALUANG, SONGS, FROM A TAPE BOUGHT IN SUMATRA 1994


LOCAL PROJECTS ( each cd has 500 copies, 100 are given to the concerned communities) :

3 CDS PRODUCED IN RATANAKIRI CAMBODIA 2006 by Ian Baird, Jeremy Ironside, Laurent Jeanneau
4 CDS PRODUCED IN CHAMPASAC. ATTAPEU, XEKONG LAOS 2006 by GAPE, Ian Baird, Laurent Jeanneau
DOUBLE CD PHNONG IN MONDOLKIRI CAMBODIA 2007 by Sylvain Vogel, Laurent Jeanneau produced by l Ambassade de France a Phnom Penh


CDS RELEASED BY OTHER LABELS:

DOUBLE CD HADZAS BUSHMEN OF TANZANIA, MUSIQUE DU MONDE, FRANCE 2003 CD ETHNIC MINORITY MUSIC OF NORTHEAST CAMBODIA, SUBLIME FREQUENCIES, SEATTLE USA 2006
CD ETHNIC MINORITY MUSIC OF SOUTHERN LAOS, SUBLIME FREQUENCIES, SEATTLE USA 2007
CD ETHNIC MINORITY MUSIC OF NORTH VIETNAM, SUBLIME FREQUENCIES, SEATTLE USA 2007

to be released later on in 2009 : VYNIL GONGS, BIMBO TOWER PARIS FRANCE

ELECTRONIC STUFF:
Depuis 1995 je compose de la musique électronique expérimentale, de 1995 a 2000 utilisant différentes machines, depuis 2000 utilisant un ordinateur je puise dans ma collection d'enregistrements ethniques pour inventer une musique électronique acoustique abstraite.
1 TRACK TARLOSE & EARSHOT LIVE IN NYC ON SOUNDLAB CD FLAV O PAC NEW YORK USA 1999
1 TRACK TARLOSE WASHING MACHINE ON TELE TRAVAIL CD ADENOIDE TOULOUSE FRANCE 1999
CD BUSHMEN REMIX RELEASED BY STICHTING MIXER AMSTERDAM NETHERLANDS 2003
1 TRACK ON PHOSPHOR MAGAZINE CD BERLIN GERMANY 2003
CD SOUNDSCAPE CHINA , KINK GONG RELEASED BY KWANYIN, BEIJING CHINA 2007 CD TANZANIAN REMIX, KINK GONG, 2000/2004
CD CAMBODIAN REMIX, KINK GONG, 2003/2006
CD LAOTIAN REMIX, KINK GONG, 2006/2008
CD VIETNAMESE REMIX, KINK GONG, 2006/2008
CD CHINESE REMIX, KINK GONG, 2002/2009
2 TRACKS ON DOKIDOKI DOUBLE VYNIL I REGRET NOT HAVING KISSED YOU, PARIS FRANCE 2008
1 TRACK ON 4 NINABIS DOUBLE VYNIL BATTERIE FAIBLE, TOULOUSE FRANCE 2008 PART OF MATHEW ADKINS 60 COMPOSERS PROJECT TRIBUTE TO PIERRE SCHAEFFER CD ENGLAND 2008

to be released later on in 2009 :
CD KINK GONG SOUTH EAST ASIA EXTRA LARGE ON DOKIDOKI PARIS FRANCE
CD KINK GONG ELECTRONIC WORLD ON ATAVISTIC CHICAGO USA

for more infos please contact kinkgong at gmail.com or shitanding at yahoo.com.cn
laurent jeanneau : www.myspace.com/kinkgong,
youtube.com/kinkgongmusic
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